Le sapin baumier incarne à la fois la beauté et la richesse de notre patrimoine forestier. Jadis, il fut un arbre de première nécessité pour plusieurs peuples autochtones. Aujourd’hui, symbole de Noël par excellence, il ne se contente pas d'embellir nos paysages hivernaux : il continue de nous rendre de précieux services. Dans cet article, nous explorerons ses multiples facettes : son habitat, son utilisation au jardin, son entretien, et bien plus encore. Plongeons ensemble dans l'univers de ce "roi" des forêts québécoises !
Présentation Générale du Sapin Baumier
Le sapin baumier, ou Abies balsamea, est indigène de l’Amérique du Nord et particulièrement répandu dans les forêts boréales du sud du Québec. C’est le seul représentant indigène du genre Abies au Québec et c’est le plus nordique de tous les sapins de la planète. Toutes les autres espèces offertes sur le marché sont introduites.
Chez les Premières Nations, on rapporte qu’il était un arbre très important du quotidien. Il faisait partie intégrante de la pharmacopée, mais aussi, tout comme l’épinette, son bois servait pour la fabrication de canots, de raquettes et de toboggan. Ses branches étaient utilisées pour les lits dans les habitations traditionnelles et ses racines servaient de cordage pour coudre les pièces de canots d’écorce. La gomme de sapin pouvait être utilisée pour calfeutrer les jointures et rendre ainsi les canots imperméables.
De nos jours, son importance économique et écologique reste majeure. Son bois, léger et résistant, est utilisé dans la construction et la fabrication de meubles, sa fibre, dans l’industrie des pâtes et papiers. Finalement, sa gomme et son huile essentielle sont recherchées pour leurs propriétés médicinales et aromatiques. Et n’oublions pas, bien sûr, la production de sapins de Noël.
Description botanique du sapin baumier
Ce beau conifère de croissance lente peut atteindre 20 à 25 mètres de hauteur et il peut vivre au-delà de cent ans. Bien que possédant des caractéristiques qui lui sont propres et qui permettent de le distinguer, il est souvent confondu avec les autres conifères. C’est ainsi qu'il arrive que pins, épinettes, pruches ou genévriers reçoivent spontanément le titre de sapin. Récemment, nous nous sommes amusées à rédiger un article pour vous aider à distinguer Sapin et épinettes. Sauriez-vous vous souvenir des caractéristiques physiques du sapin?
- Aiguilles : plates, aux bouts arrondis qui ne piquent pas, réparties en 2 rangs de chaque côté des rameaux, vert foncé sur le dessus, avec 2 stries blanches en dessous.
- Rameaux : allure aplatie
- Cônes: Cylindriques, de 5 à 10 cm, dressés
- Écorce : Jeune écorce lisse, grisâtre, avec des vésicules saillantes de laquelle la résine s’écoule. L’écorce devient plus rugueuse et brune avec l'âge.
Où trouver le sapin baumier en milieu naturel au Québec?
Très rustique (Zone 1) et adapté aux conditions froides, on peut pratiquement le retrouver sur tout le territoire du Québec, jusqu’en Ungava. Il peut s’accommoder de différents types d’habitats, mais il préfère les sols acides, bien drainés et humides.
Il est présent en abondance en forêt boréale, en particulier dans les régions plus humides comme c’est le cas dans l’est de la province et au Nouveau-Brunswick. Toutefois la situation est appelée à changer, car sa distribution et sa longévité sur notre territoire seraient fragilisées par les perturbations climatiques que nous vivons. Pour davantage d’information sur cette question, voyez cet article dans Le Devoir.
Comment Cultiver le Sapin Baumier?
Le sapin baumier s’intègre facilement dans les aménagements paysagers, en isolé ou dans un groupement de végétaux mixtes. En hiver, comme pratiquement tous les conifères, la verdure de son feuillage et ses cônes constituent des éléments visuels attrayants du paysage. À ces qualités s’ajoute son arôme incomparable.
Choix du site
Retenez que la culture et l’entretien du sapin baumier sont somme toute faciles, si au départ vous lui réservez un endroit qui lui convient.
L’ensoleillement
Pour une croissance optimale, offrez-lui un emplacement au soleil ou à la mi-ombre. Si vous le placez à l’ombre, il s’adaptera, mais il se développera très lentement.
Type de sol
En partant du principe que les problèmes les plus courants chez le sapin sont les pourritures racinaires et la dessiccation hivernale, vous contribuerez à son essor en l’implantant dans un sol profond, à la fois bien drainé et humide, et protégé des vents dominants.
Un bon drainage
S’il est vrai qu’un sol qui se draine rapidement diminue grandement les risques de maladies racinaires, vous devez tout de même lui éviter les sols trop sableux. Ceux-ci, retenant trop peu l’eau, ne lui sont pas appropriés en temps de sécheresse. Aussi, le sable a une trop faible capacité à retenir les éléments nutritifs. À l’opposé, les sols trop argileux sont aussi à éviter, car ils se drainent mal et ils se compactent trop. Tous les autres types de sols devraient leur convenir.
Acidité du sol
Au Québec, les sols sont généralement acides. Ces conditions conviennent bien pour l’établissement du sapin baumier. Si vous désirez vous assurer du niveau d’acidité de votre sol, nous vous recommandons de préparer un échantillon que vous apporterez dans un centre de jardin spécialisé offrant le service d’analyse. Le niveau de pH adéquat se situe entre 5,0 et 6,0. 
À l’abri des grands vents
Le feuillage du sapin baumier peut subir des dommages liés au gel et au dégel en fin de saison hivernale surtout. On observe alors le rougissement des aiguilles et l’assèchement des bourgeons. Le meilleur emplacement est donc un site où l’air circule bien, tout en étant à l’abri des vents dominants.
L’arrosage
Le sapin baumier se développe bien lorsque les conditions sont humides, alors une couche de paillis au sol peut être fort utile. N’oubliez pas de vérifier de temps en temps que le sol est suffisamment humide, en particulier lors de longues périodes de sécheresse.
En automne, s’il n’a pas plu s’il ne pleut pas pendant une longue période avant les premiers gels, bien les irriguer permet aux aiguilles de refaire leurs réserves en eau. Cela les aidera à ne pas se déshydrater au cours de l’hiver qui suit.
La fertilisation
Le sapin baumier est considéré comme un arbre peu gourmand. L’ajout de mycorhizes à la plantation est tout à fait approprié dans ce cas. Un engrais à libération contrôlée est aussi une bonne option pour la première année. Puis, une fois le conifère bien établi, un apport périodique en engrais azoté est probablement suffisant. À noter que les sols du Québec contiennent généralement assez de phosphore et de potassium pour combler les besoins des sapins matures, surtout en présence de mycorhizes.
Comment tailler un sapin baumier?
Il n’est pas obligatoire de tailler un sapin. Vous pouvez le laisser croître à sa guise. Mais si vous désirez une forme typique triangulaire et un feuillage plus dense, voici les principales règles :
- La taille de formation doit toujours être effectuée sur les pousses de l’année seulement. Elles se distinguent facilement par leur couleur vert lime.
- Le moment idéal pour pratiquer la taille du sapin est vers le début de l’été (mi-juillet environ). Les bourgeons ont alors débourré, mais les aiguilles ne se sont pas encore étalées complètement.
- Coupez entre le tiers et les deux tiers de la longueur des nouvelles pousses sur les branches latérales. Ne retirez jamais plus de 70% d’une nouvelle pousse, car il risque de ne plus rester des bourgeons matures pour la croissance des années futures.
- Attendre deux ou trois ans après la plantation de votre petit sapin avant de commencer à le tailler. Celui-ci devrait avoir environ un mètre de hauteur au moins.
Deux exceptions à cette règle :
- Lorsqu’un sapin a deux têtes, on le taille dès le premier printemps, pour ne garder qu’une seule tête. Conservez la plus vigoureuse, la plus centrée et avec le plus grand nombre de bourgeons. Raccourcissez l’autre tête pour qu’elle s’intègre dans la ligne de la forme de l’arbre.
- Si une branche latérale a une croissance plus grande que la tête, alors il convient de la raccourcir dès le premier printemps.
- Lorsque le sapin est âgé de plus de 2 ou 3 ans, la flèche (tête) est vigoureuse et elle croît à une vitesse plus grande que les branches latérales. Il est possible de la raccourcir pour mieux proportionner la forme de l’arbre. Il s’agit alors de la rabattre à une longueur de 25 à 30 cm environ. Taillez à environ 3 cm au-dessus d’un gros bourgeon.
Puis-je cultiver mon sapin baumier en pot?
Voilà une question qui nous est fréquemment posée. La réponse est oui, cela est possible. Étant donné que sa croissance est lente et qu’il est très rustique, le sapin est considéré un bon candidat pour la culture en contenants.
Il vous faut le cultiver dans un pot plus grand que celui dans lequel vous l’avez acheté. Ajoutez des mycorhizes pour conifères si le terreau de départ n’en contient pas. Quand la motte de terre devient trop dense, changez pour un pot dont le diamètre est environ 5 cm plus grand.
L’entretien est semblable à celui d’un sapin cultivé en plein sol. Seulement, il faut l’arroser plus souvent. Aussi, il faut veiller à ce qu’il ne manque de rien d’un point de vue nutritif, mais sans excès pour maintenir une croissance lente. À chaque changement de pot, ajouter du terreau de bonne qualité est profitable.
Au cours de l’automne, il est important de poursuivre les arrosages réguliers. Ainsi, ses aiguilles seront bien hydratées et elles risqueront moins de se déshydrater durant l’hiver. Avant les gels le terreau doit être humide, mais sans excès. Si votre conifère en pot est trop exposé au vent, couchez le pot sur le côté et couvrez-le d’une couverture ou d’une toile.
Puis-je entrer mon sapin en pot dans la maison pour Noël?
Encore une fois, la réponse est oui, mais cela est une opération très risquée. Le sapin vit au ralenti durant l’hiver. Il ne faut surtout pas qu’il ait le temps de s’activer et de perdre la résistance au froid qu’il a acquise progressivement à l’automne.
Donc, pour diminuer les risques de l’endommager sérieusement, ne le gardez pas plus de 7 jours à l’intérieur, dans un endroit frais et loin d’une source de chaleur. Arrosez-le, car il ne doit surtout pas manquer d’eau. Lorsque vous le remettrez dehors, il aura besoin d’une période de transition au frais, dans un garage non chauffé par exemple, pendant une semaine. Puis, vous le mettrez dehors par temps doux, pour qu’il regèle progressivement.
C’est beaucoup de travail, pour risquer de perdre son arbre, n’est-ce pas? Alors, pourquoi ne pas plutôt cultiver un pin de Norfolk à la place? C’est bien plus simple et vous pouvez en profiter toute l’année à l’intérieur. Il ne vous reste qu’à le décorer le temps venu!
Quelles sont les Propriétés Médicinales du Sapin Baumier?
Il est connu qu’écorce, aiguilles, bourgeons et gomme peuvent servir à différents usages potentiels (anti-inflammatoire, antiseptique, antirhumatoïde, apaisement des voies respiratoires et bien d’autres.) Mais aussi, les arômes de sapin stimuleraient l’endorphine. Ah! l’hormone du bonheur! Peut-être est-ce là l’explication derrière la grande popularité du sapin baumier comme arbre de Noël?
Cela vous aura peut-être donné l’envie de prélever des petites brindilles de bonheur sur le sapin dans votre jardin. Si tel est le cas, nous avons prévu vous expliquer comment faire pour ne pas nuire aux arbres ni à leur forme.
Comment cueillir les pousses de sapin baumier?
Le moment idéal de la récolte des pousses de sapin se situe en juin. Les bourgeons ont alors commencé à éclore. Les pousses sont vert lime. C’est à ce moment qu’elles sont les plus tendres et les plus sucrées. Vous pouvez en récolter quelques-unes avec vos doigts ou à l’aide d’un petit sécateur.
Mais attention! Puisque vous cueillez la pousse entière, vous emportez avec elle tous les nouveaux bourgeons pour la croissance des années suivantes. Pour préserver la forme, répartissez vos coupes tout autour de l’arbre. Et surtout, soyez très raisonnables, afin de conserver sa vigueur. Ce dernier conseil est d’autant plus important en milieu naturel, car nous ne voulons pas nuire à la nature si généreuse.
En effet, le sapin baumier, au-delà de sa beauté et de son utilité pour nous, joue un rôle important dans l'équilibre écologique de nos régions. En tant qu’arbre pionnier, il participe à la régénération des forêts. Il offre aussi un habitat précieux pour de nombreuses espèces d’insectes et d'animaux comme les oiseaux et les petits mammifères.
Notre « roi » végétal influence les conditions microclimatiques des sous-bois boréaux, et crée un environnement propice à une variété de plantes, de champignons et d'insectes qui prospèrent sous son ombre. Ces interactions permettent à une biodiversité complexe de s'installer et de se maintenir dans son royaume écologique.
Article co-écrit par Audrey Rondeau, Biol., M. Env. et Directrice production et développement, Pépinière Vert Forêt et Suzanne Simard, B. Sc., rédactrice spécialisée en horticulture et diplômée comme technologue en horticulture
Médiagraphie
Cardinal-Corriveau, S., & Gariépy, M.-J. (2015). Le sapin baumier : Arbre médicinal de l’année 2015. Guilde des Herboristes.org.
Inventaire des ressources ethnologiques du patrimoine immatériel. (s. d.). Consulté le 5 décembre 2024, à l’adresse http://www.irepi.ulaval.ca/fiche-fabrication-canot-ecorce-960.html?from=home
Les arbres de Noël au Québec—De la plantation à la mise en marché | Horticulture ornementale—Arbre de Noël—Agri-Réseau | Documents. (s. d.). Agri-Réseau. Consulté le 28 novembre 2024, à l’adresse https://www.agrireseau.net/horticulture-arbresdenoel/documents/102130/les-arbres-de-noel-au-quebec-de-la-plantation-a-la-mise-en-marche
Sapin baumier. (s. d.). Espace pour la vie. Consulté le 5 décembre 2024, à l’adresse https://espacepourlavie.ca/flore-biodome/sapin-baumier
Ressources Naturelles et Forêts Québec. (2022). Zones de végétation et domaines bioclimatiques du Québec (No de publication F24-06-2211)
