L’érosion est un phénomène de dégradation du sol par l’action de l’eau ou du vent. En milieu agricole, elle entraîne chaque année la perte de plusieurs hectares de terres pour l’ensemble des producteurs. Tantôt, c’est le vent qui fait partir le sol en poussières, tantôt c’est l’eau de pluie qui érode les terrains en pente. Cette eau de ruissèlement emporte avec elle non seulement des particules de sol, mais aussi des éléments fertilisants. La même chose se produit lors d’épisodes de crues, alors que les berges sont endommagées par l’eau qui déferle sur la rive. Bref, l’érosion appauvrit le sol et, par conséquent, son propriétaire.
Comment contrer l’érosion des sols?
Pour contrer l'érosion des sols, plusieurs méthodes efficaces peuvent être employées. Pour les producteurs de grandes cultures, les pratiques culturales appropriées sont un outil majeur contre l’érosion. L'utilisation de couvertures végétales, comme les cultures de couverture, aide à protéger et à stabiliser le sol. Le labourage minimum, ou l'agriculture sans labour, préserve la structure du sol. La pratique de l'agriculture en contour, suivant les lignes de niveau du terrain, réduit le ruissellement de l'eau.
Installer des structures de contrôle de l'érosion, telles que des barrages, peut aussi intercepter le flux d'eau. Enfin, la plantation d'arbres et de haies en bordure des champs ou des fossés offre une protection contre le vent et l'eau, tout en augmentant la biodiversité.
En somme, les végétaux exercent plusieurs fonctions qui permettent de limiter les pertes de sol par érosion :
- Ils retiennent et stabilisent les sols grâce à leurs racines.
- Leurs parties aériennes atténuent le vent.
- Leur présence diminue la vitesse d’écoulement des eaux de pluie.
- Ils rendent le sol plus perméable.
- Ils absorbent une partie de l’eau de pluie.
Plusieurs espèces végétales sont recommandées pour stabiliser les sols. Pour les situations en bandes riveraines, nous vous invitons à consulter ce répertoire comprenant une liste de végétaux recommandés pour la végétalisation, parmi lesquels vous trouverez les saules qui sont des alliés importants.
Pourquoi les saules sont-ils efficaces pour stabiliser les sols?
Les saules possèdent des racines denses qui fixent le sol et réduisent l'érosion. Leur croissance rapide permet une couverture végétale efficace en peu de temps. Les saules résistent même à l’action des glaces grâce à leurs tiges flexibles. Ils sont tolérants è différents types de sol, en particulier les sols lourds et humides. Comme ils supportent bien l'humidité, ils sont idéaux pour les zones humides et les berges exposées à l'érosion. On les utilise alors en haut (replat), au milieu ou au bas d’un talus.
Plusieurs espèces de saules sont indigènes ou naturalisées, ce qui représente un avantage pour restaurer un site et préserver la biodiversité. Ces espèces attirent notamment les abeilles et les papillons.
Les espèces de saules indigènes ou naturalisés utilisées au Québec
Le Saule Miyabeana (Salix miyabeana)
Zone : 4a. H : 6-7m. L : 6-7m. Exposition : Soleil ou mi-ombre.
Principales caractéristiques :
Semblable au saule à osier, il présente un feuillage allongé qui crée une texture légère et aérienne. Il ne s’étend pas au-delà de sa zone de plantation. C’est pourquoi il est souvent utilisé pour les plantations en groupe. Il sert également d’habitat pour la faune locale.
Le saule à osier (Salix viminalis)
Zone : 4a. H : 3-6m. L : 6-7m. Exposition : Soleil.
Principales caractéristiques :
Il est apprécié pour sa facilité d’entretien, grâce à sa résistance aux maladies et aux ravageurs. Ses branches longues et fines peuvent être utilisées en vannerie et en artisanat. Bien que sa croissance est rapide, il ne s’étend pas au-delà de sa zone de plantation. Il est idéal pour les plantations en groupe.
Saule à tête laineuse (Salix eriocephala)
Zone : 3. H : 6-8m. L : 4-5m. Exposition : Soleil.
Principales caractéristiques :
Ce saule préfère les sols organiques et humides. Il tolère une immersion prolongée dans l’eau et il est souvent utilisé en bas de talus.
Saule brillant (Salix lucida)
Zone : 1. H : 3-8m. L : 3-5m. Exposition : Soleil ou mi-ombre.
Principales caractéristiques :
Ce saule résiste aux forts vents. On l’utilise en bas de talus.
Le Saule de l’Intérieur, ou Salix interior
Zone : 4a. H : 4-7m. L : 2-3m. Exposition : Soleil ou mi-ombre.
Principales caractéristiques :
Ce saule est résistant aux maladies et ravageurs. Sur le talus, on l’utilise au bas, au milieu ou sur le replat. Il prendra tout l’espace disponible. Il préfère les sols lourds et humides. Ses feuilles sont allongées et fines. En plus de stabiliser les sols dans les zones humides, il sert d’habitat pour la faune indigène.
Le Saule Discolore, ou Salix discolor
Zone : 2a. H : 2-5m. L : 4-5m. Exposition : Soleil.
Principales caractéristiques :
Ce saule indigène au Québec est très résistant au froid. Il est reconnu pour ses chatons duveteux argentés qui apparaissent avant les feuilles au début du printemps, attirant les premiers pollinisateurs de la saison. Sur le talus, on l’utilise au bas, au milieu ou sur le replat. Utilisé en bas, au milieu ou sur le replat du talus, il stabilise les sols dans les zones humides. Il sert d’habitat pour la faune indigène. Une taille annuelle peut être nécessaire pour maintenir sa forme. Il est adapté aux conditions maritimes.
Salix à long pétiole (Salix petiolaris)
Zone : 2. H : 1-3m. L :1-2m. Exposition : Soleil.
Principales caractéristiques :
Il tolère les sols pauvres. Une fois établi, il peut résister à une sécheresse temporaire.
Concept et fonctionnement de la stabilisation des sols et des berges avec des végétaux
Le concept de stabilisation végétale regroupe diverses techniques visant à prévenir l’érosion du sol par l’eau. Son principal avantage réside dans son caractère écologique. En effet, les méthodes et les matériaux utilisés cherchent à recréer des environnements naturels autant que possible.
Composantes d’un ouvrage de stabilisation végétale
Les structures et matériaux inertes
Différentes structures de support sont réalisées pour maintenir le matériel végétal en place durant l’établissement, pour éviter la perte de sol ou pour prévenir le développement de mauvaises herbes. Parmi les optons, on trouve des pieux, des piquets de bois, des matelas ou disques de fibres naturelles, des grillages, des géotextiles etc. Dans tous les cas, les matériaux naturels ou biodégradables sont privilégiés.
Les végétaux
Dans la majorité des techniques, ce sont les végétaux qui offrent le plus grand potentiel de stabilisation du sol ou de la berge.
Quelles sont les techniques de stabilisation par les végétaux?
Plusieurs techniques entièrement végétales ont été développées pour résoudre une variété de problèmes et de situations. Elles sont classées en deux catégories : la végétalisation des rives et le génie végétal.
La végétalisation des rives :
Cette méthode utilise exclusivement des végétaux pour résoudre des problèmes d’érosion mineurs. Elle est généralement assez simple pour qu’on puisse la mettre en œuvre sans l’aide d’un professionnel.
Elle consiste à implanter des espèces herbacées et arbustives sur le talus à protéger, en tenant compte des conditions climatiques, des caractéristiques spécifiques du talus, des risques d’inondation. Parmi les espèces végétales indigènes les plus utilisées pour cette technique, on trouve les saules arbustifs (vus précédemment), l’aulne rugueux, la spirée à larges feuilles, le cornouiller stolonifère et le myrique baumier.
La figure suivante illustre la technique de végétalisation d’un talus.
Si vous désirez planifier et exécuter votre propre projet de végétalisation, la Fiche technique sur la stabilisation des rives publiée par le ministère de l’Environnement, de la Lutte aux changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) fournit toutes les étapes pour concevoir et mettre en oeuvre un projet de végétalisation d’un talus. Voici un résumé des principales étapes :
Étapes de planification d'un projet de stabilisation avec des saules
- Étape 1. Évaluation du site : Commencez par évaluer le site pour déterminer le type de sol, le niveau de drainage, l'exposition au soleil et autres facteurs environnementaux. Cette évaluation aidera à choisir les variétés les mieux adaptées. Assurez-vous que la pente du talus est stable. On évite des pentes supérieures à 1:2.
- Étape 2. Choix des variétés: Sélectionnez des espèces qui conviennent au type de sol, au climat, et aux besoins spécifiques de stabilisation du site. Par exemple, certains saules sont mieux adaptées aux sols humides, tandis que d'autres peuvent mieux résister à la sécheresse.
- Étape 3. Conception du plan de plantation : Élaborez un plan de plantation détaillé qui spécifie l'emplacement des végétaux, et la densité de semis et de plantation.
- Étape 4. Ensemencement des surfaces dénudées : Les périodes idéales pour les semis sont le printemps (fin avril à mi-juin) et l’automne (mi-août à la fin de septembre). Assurez-vous que le sol reste humide jusqu’à la germination du semis.
- Étape 5. Plantation des arbustes : Commencez par le bas du talus, puis remontez progressivement. S’il y a lieu, procédez à la plantation des arbres choisis. Il est recommandé de planter des arbres uniquement sur le replat d’un talus en pente faible, car leur poids et leur port imposant augmentent les risques de déracinement. Veillez à ce que les végétaux nouvellement plantés ne manquent pas d’eau.
- Étape 6. Entretien : Établissez un programme d'entretien régulier qui inclut l'irrigation, la taille si nécessaire, le contrôle des mauvaises herbes et la surveillance de la santé des végétaux.
- Étape 7. Surveillance et évaluation : Surveillez attentivement la croissance et la santé des végétaux au fil du temps. Évaluez périodiquement l'efficacité de la stabilisation du site et apportez des ajustements au besoin.
En suivant ces étapes de planification et en prenant soin des saules et des autres végétaux tout au long du processus, vous pouvez créer un système de stabilisation efficace et durable pour votre site.
Le génie végétal
Le génie végétal combine des principes d'écologie et d'ingénierie pour concevoir des structures de stabilisation des talus, des berges et des rives. Dans cette approche, les plantes sont utilisées comme matériaux de base pour créer des armatures végétales. Les techniques employées incluent l'utilisation de boutures, de rangs de plaçons, de fagots, de fascines, de matelas de branches, ou un mélange de ces méthodes.
Ces techniques sont complexes et requièrent une connaissance approfondie des végétaux et de la structure des sols, C’est pourquoi, elles nécessitent l'intervention de professionnels.
Toutes les techniques du génie végétal sont détaillées dans le Guide des bonnes pratiques pour la protection des rives, du littoral et des plaines inondables. Le tableau ci-après en présente une synthèse.
L’érosion est un phénomène naturel, mais il est souvent amplifié par les interventions humaines. Il dégrade les terres agricoles, les propriétés riveraines, en plus des habitats naturels. Bien que vous puissiez réaliser vos travaux de végétalisation par vous-même, il est recommandé de faire valider votre projet par un expert en agroenvironnement. Ce professionnel pourra du même coup vous informer des subventions gouvernementales disponibles pour ce type de projet.
Indépendamment de la technique de stabilisation utilisée, il est obligatoire d’obtenir toutes les autorisations requises. Pour un terrain privé, consultez d’abord votre municipalité. S’il s’agit d’un projet de plus grande envergure, contactez le bureau régional du ministère de l’Environnement, de la Lutte aux changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP). Selon le cas, d’autres autorisations pourraient être exigées.
Références
Je végétalise ma bande riveraine. (s. d.).
MELCCFP. (2011). Fiche technique sur la stabilisation des rives.
Société québécoise de phytotechnologie. (2019). Stabilisation des pentes.
Article co-écrit par Audrey Rondeau, Biol., M. Env. et Directrice production et développement, Pépinière Vert Forêt et Suzanne Simard rédactrice spécialisée en horticulture et diplômée comme technologue en horticulture.