Comment reconnaitre L’érable à Sucre, arbre emblématique du Québec bien connu pour son sirop
Le printemps au Québec est définitivement associé à la célèbre période du temps des sucres. En ce printemps 2024, un printemps hâtif exceptionnel sous l’influence certaine d’El Niño, on peut dire que le temps des sucres bat son plein dans les érablières québécoises.
Le Québec occupe une place prépondérante dans la production mondiale de sirop d'érable, en fait, le Québec est le plus grand producteur de sirop d'érable au monde, fournissant environ 70 à 80 % de la production mondiale totale. La province possède un climat et des conditions géographiques idéales pour la culture de l'érable à sucre, ce qui en fait un leader incontesté dans ce domaine.
Petit survol du genre des Acer, les érables
On compte dans le monde près de 130 espèces d’érables réparties dans trois catégories : Le type américain, le type européen et le type oriental.
On décompte 13 espèces d'érables originaires de l’Amérique du Nord et 10 espèces indigènes du Canada.
Au Québec, nous avons 6 espèces d'érable indigènes :
L’érable à sucre (Acer saccharum), l’érable rouge (Acer rubrum), l’érable argenté (Acer saccharinum), l’érable noir (Acer nigrum), l’érable de Pensylvanie (Acer pensylvanicum) et l’érable à épis (Acer spicatum). De ces 6 espèces, les 4 premières donnent de l’eau sucrée, on les appelle les érables sucriers.
Voyons comment les reconnaître !
Érable, montre-moi tes feuilles et je te dirai qui tu es
Pour savoir à laquelle des quatre espèces sucrières appartient un spécimen, le meilleur critère à considérer ou plutôt la façon la plus facile est d'observer les feuilles.
Les critères distinctifs des feuilles des érables (dimension, nombre de lobes, aspect des sinus, aspect des bordures et couleur) sont assez typiques et permettent de bien départager chaque espèce.
Feuilles de l’Érable à Sucre (Acer saccharum)
Les feuilles de l’érable à sucre sont les plus grandes avec un 8 à 20 cm de largeur. Elles présentent habituellement 5 lobes profonds avec des sinus arrondis. Elles ont une texture lisse et brillante. Au printemps et en été, les feuilles de l'érable à sucre sont vert sombre sur le dessus et vert clair sur le dessous. En automne, elles prennent des teintes vives allant du jaune au rouge orangé.
Feuilles de l’Érable Rouge (Acer rubrum)
Les feuilles de l'érable rouge sont les plus petites avec une largeur de 5 à 10 cm. Elles ont la plupart du temps 3 lobes avec des sinus aigus et des bordures finement dentelés. Les feuilles de l'érable rouge sont souvent rougeâtres, surtout au printemps et à l'automne. En automne, elles peuvent devenir de couleur rouge vif, orange ou jaune, créant un merveilleux spectacle coloré. La face inférieure de la feuille est souvent plus pâle que le dessus.
Les feuilles de l’Érable Argenté (Acer saccharinum)
Les feuilles de l'érable argenté sont de grandeur moyenne avec un 8 à 15 cm de largeur. Elles se divisent en 3 à 5 lobes avec des sinus aigus profonds et une bordure finement dentelée. Les feuilles de l'érable argenté ont une couleur très typique argentée sur le dessous. Au printemps et en été, les feuilles sont vert clair sur le dessus. En automne, elles transitent vers une couleur jaune vif.
Les feuilles de l’Érable Noir (Acer nigrum)
Les feuilles de l’érable noir sont de moyenne dimension avec une largeur de 8 à 15 cm. Elles présentent entre 3 et 5 lobes avec des sinus assez profonds, mais moins que ceux des érables à sucre et une bordure finement dentelée. Les feuilles de l'érable noir ont une couleur vert foncé avec une apparence flétrie. La couleur du dessous de la feuille est plus pâle et celle-ci présente une pubescence distinctive (présence de poils donnant une apparence velue). En automne, elles peuvent prendre des teintes jaunes, orangées ou rouges, mais elles tendent généralement vers le jaune doré.
Quelques critères réservés aux plus experts pour reconnaître les Érables
L’écorce des érables
La couleur et la forme de l’Écorce peuvent aider à distinguer les érables, mais seul un œil très expérimenté y arrivera. Il peut y avoir beaucoup de variations en fonction de l’âge des arbres et des conditions de croissance. L’aspect de l’écorce peut aider, mais souvent il faudra valider avec un autre critère pour faire sûr !
Érable à sucre | Érable rouge | Érable argenté | Érable Noir |
Généralement gris pâle à gris foncé. | Généralement lisse et grisâtre à brunâtre. | Gris clair à grise argenté. Elle peut avoir des nuances de blanc, en particulier sur les jeunes arbres. | Généralement gris foncé à noirâtre. |
Lisse dans la jeunesse, mais avec l'âge, elle peut développer des fissures ou des sillons verticaux peu profonds. | Peut présenter des fissures verticales peu profondes avec l'âge, mais elles sont souvent moins prononcées que celles de l'érable à sucre. | Souvent lisse mais elle peut développer des fissures verticales peu profondes avec l'âge. | Peut être fissurée et présenter des sillons verticaux profonds même à un âge précoce. L'écorce plus âgée peut même avoir des plaques qui pèlent légèrement. |
Les bourgeons d’hiver des érables
En hiver, en l’absence de feuilles, les bourgeons terminaux peuvent permettre de distinguer les différentes espèces, il faut cependant avoir l’œil bien aiguisé pour y arriver !
Érable à sucre | Érable rouge | Érable argenté |
Érable noir |
Généralement assez petits et pointus. | Généralement plus gros que ceux de l'érable à sucre avec une forme plus arrondie. | Souvent plus longs et plus minces que ceux de l'érable à sucre. | Souvent plus petits que ceux de l'érable à sucre et peuvent être légèrement pointus. |
Couleur brun rougeâtre à brun foncé. | Couleur brun rougeâtre à brun foncé. | Couleur brun clair à brun foncé. | Couleur brun foncé à noirâtre. |
Peuvent être légèrement collants au toucher. | Peuvent être légèrement poilus ou pubescents. | Glabres (non poilus) et brillants. | Peuvent être légèrement poilus ou pubescents. |
Les samares ou les fameux hélicoptères
Les fruits des érables, qu’on appelle aussi les samares, peuvent beaucoup aider pour identifier une espèce. Déjà la période de l’année à laquelle les samares tombent des arbres peut permettre de départager deux groupes : ceux qui dispersent leurs samares en début de saison et ceux qui les dispersent en fin de saison.
Les premiers à perdre leurs samares au printemps, en mai, sont les érables argentés. Les samares de l'érable argenté sont généralement plus grandes que celles de l'érable à sucre, mesurant environ 3 à 5 centimètres de long. Elles sont souvent disposées en grappes et ont des ailes relativement larges et bien développées. Elles peuvent avoir une teinte brune à brun clair, parfois avec une teinte argentée.
Ensuite ce sera au tour des érables rouges de disperser leurs samares vers la fin du printemps ou le début de l’été, en juin. Les samares de l'érable rouge sont généralement plus petites que celles de l'érable à sucre, mesurant environ 1 à 2 centimètres de long. Elles sont souvent disposées en grappes et ont des ailes plus petites et moins distinctes que celles de l'érable à sucre. Elles ont généralement une teinte rougeâtre ou brune.
C’est en automne que les deux autres espèces, l’érable à sucre et l’érable noir, dispersent leurs samares. Pour les départager il faut un œil averti !
Les samares de l’érable à sucre sont généralement assez grandes, mesurant environ 2 à 3 centimètres de long. Elles sont habituellement disposées en grappes et ont deux ailes bien développées qui sont écartées à environ 60 degrés l'une de l'autre. Elles sont de couleur brun clair à brun foncé.
Les samares de l’érable noir sont généralement plus petites que celle de son très proche cousin l’érable à sucre, mesurant environ 1 à 2 centimètres de long et sont aussi disposées en grappes. Elles ont des ailes plus petites et moins distinctes que celles de l'érable à sucre. Leur couleur varie de brun foncé à noirâtre.
L’érable à sucre, champion de la sève sucrée, mais il a tout de même de la compétition
La production du sirop d’érable est majoritairement issue de la sève (ou l’eau d’érable) récoltée des érables à sucre qui dominent nos érablières québécoises.
Vous êtes peut-être étonné de savoir que trois autres espèces d’érables présents dans nos forêts produisent aussi de la sève sucrée qui peut être utilisée pour la fabrication de sirop d’érable. Il s’agit de l’érable rouge, l’érable noir et l’érable argenté.
On appelle l’ensemble des érables qui produisent une sève sucrée, les érables sucriers.
L’érable à sucre donne définitivement l’eau la plus sucrée, mais il existe peu ou pas d’études sur la rentabilité à l’entaille en fonction des différentes espèces. Il semble y avoir un consensus dans la communauté acéricole sur le fait que l’érable rouge, communément appelé la plaine, donne aussi de très bons résultats.
L’érable noir est génétiquement très proche de l’érable à sucre, voir identique à un tel point que certains botanistes hésitent à le désigner comme une espèce distincte. Son aire de répartition est très limitée au Québec, car il est à la limite nordique de sa distribution. On le retrouve dans le sud le long de la rivière Outaouais, en Estrie, en Montérégie et dans la grande région montréalaise.
L’érable argenté donne une eau moins sucrée, mais est quand même considéré comme un érable sucrier. Pionnier des lieux très humides, il trouve sa place là où les autres ne la trouve pas.
Chaque chose à sa place : Le bon habitat pour la bonne espèce, une question de niche écologique
Chacune des quatre espèces d’érable sucrier exploite une niche écologique qui lui est propre. Une niche écologique c’est un ensemble de conditions environnementales qui permettent à une espèce de survivre et de se reproduire.
L’érable à sucre qui domine nos forêts préfère de loin les sols riches, profonds et fertiles. Il a besoin d’un sol bien drainé. Il a une faible tolérance à la pollution et a donc été peu utilisé comme arbre de rue dans les milieux urbanisés.
L’érable rouge est plus caméléon s’adaptant à une grande variété de sols, bien qu’il préfère les sols humides et bien drainés. C’est l’espèce la plus nordique. Sa polyvalence fait en sorte qu’il est souvent utilisé comme élément paysagé dans nos milieux urbains.
L’érable argenté quant à lui a définitivement une préférence pour les zones très humides. On le retrouve naturellement donc aux abords des ruisseaux, rivières et zones humides. Il s’adapte à une grande variété de types de sols. Il a été planté abondamment comme arbre de rue par le passé et fait partie intégrante des paysages urbains.
Finalement le fameux érable noir aime, comme l’érable à sucre, les sols riches, profonds, fertiles et bien drainés. Sa niche écologique est très similaire à celle de l’érable à sucre et les deux vont se côtoyer et s’hybrider de façon naturelle.
Faire son propre sirop d’érable, pourquoi pas !
Si vous avez identifié sur votre terrain un ou quelques érables sucriers, pourquoi ne pas tenter l’expérience de récolter l’eau d’érable pour faire votre propre sirop ! On connait tous quelqu’un (ou quelqu’un qui connait quelqu’un) qui a une érablière pour emprunter quelques chalumeaux et chaudières. Il vous faudra en moyennes 40 litres d’eau d’érable pour obtenir 1 litre de sirop. C'est une belle activité familiale!